Voici le pays dont nous avons hérité…

Alem_campagne.jpgLe 29 septembre, la campagne politique s’ouvrira au Togo. En simple militant, j’ai commencé mon travail au sein de la CDPA. Premier exercice, la levée des fonds. Mes carnets de souscription à la main, je démarche amis et connaissances. Les premières réactions sont plutôt négatives…

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Alem_campagne.jpgLe 29 septembre, la campagne politique s’ouvrira au Togo. En simple militant, j’ai commencé mon travail au sein de la CDPA. Premier exercice, la levée des fonds. Mes carnets de souscription à la main, je démarche amis et connaissances. Les premières réactions sont plutôt négatives : « Alem, on en a marre des partis, c’est eux le problème du Togo, on ne leur donnera rien ! Et puis, pourquoi toi-même tu n’es plus candidat aux législatives ? »

Comme s’il eût suffi que je fusse candidat, pour que mes tickets de 1000F, 5000F et 10.000 F partent comme de petits pains, faisant tomber dans l’escarcelle de la Convention Démocratique des Peuples Africains, le parti dirigé par le Professeur Gnininvi, l’actuel ministre des Mines et de l’Énergie dans le Gouvernement d’Union Nationale, quelques maigres sous qui ne suffiront même pas à couvrir les dépenses d’une campagne qui s’annonce onéreuse. Il se murmure que certains dirigeants de parti écument les palais présidentiels d’Abidjan, de Libreville et du Nigeria pour recueillir des fonds. À la CDPA, on essaye de faire confiance à la générosité du citoyen lambda, lequel exprime de plus en plus ouvertement ses griefs contre les partis politiques.

À leurs yeux, tous les partis politiques, opposition comme majorité présidentielle, seraient coupables de mensonge et d’hypocrisie. Ils auraient fait perdre des vies et du temps aux Togolais, alors qu’ils auraient pu faire depuis longtemps ce qu’ils font maintenant, à savoir s’entendre pour gouverner ensemble ! Les plus virulents parlent de « partage du gâteau », façon peu diplomatique de dire qu’au fond, la conquête du pouvoir est le seul impératif qui gouverne tous les partis, la conquête du pouvoir et sa conservation. Timidement, je tente d’argumenter. Oui, la conquête du pouvoir est le but premier d’un parti politique, mais pas la conservation du pouvoir. Puisque justement, si les choses étaient normales, seul le peuple a la souveraineté de faire conserver ou non le pouvoir à un parti. Le RPT de feu le Général Eyadema n’est pas le bon exemple qui prouve que les politiciens respectent la voix du peuple, raison pour laquelle il faut donner une leçon à ce parti et lui réapprendre le respect de la démocratie. Un parti qui a passé son temps à s’appuyer sur l’armée pour tuer et intimider mérite-t-il qu’on le mette sur le même plan que ceux qui l’ont combattu ? Mais vous aussi vous nous avez tué, s’insurge mon interlocuteur ! Vous nous avez fait croire que vous aviez des armes pour combattre la dictature, alors que vous n’aviez rien ! Le mensonge aussi est un crime, oui ou non ?

Je reste un instant sonné par la répartie. Voici donc le pays tel qu’il est devenu. Plus personne ne croit plus à rien. Dans ces conditions, je comprends que beaucoup de mes interlocuteurs désabusés me disent ne pas avoir de cartes d’électeurs. Ils ne voteront pas. À quoi servent des élections dans un pays où un seul parti, appuyé par des milices et des militaires aux ordres volent les urnes sous les yeux des caméras des télévisions du monde entier ? Triste pays, entité aux rues sales et défoncées, avec des chefs sans ambition remarquable autre que celui de régner dans la paix des cimetières. Mais c’est le pays, on n’en a pas un autre. Ne peut-on pas, ne doit-on pas une énième fois, tenter de lui donner un autre cours, en allant cette fois-ci voter avec la volonté ferme de donner une leçon aux criminels qui l’ont rendu ainsi ? Mais oui, Monsieur, vous aussi faites partie des criminels ! Moi ? Oui, vous !

Cette fois-ci je suis vraiment sonné. Je remballe mes tickets et salue mon interlocuteur. « Mon frère, dans ce cas, on va faire comment ? » Il ne m’écoute plus. Je vais aller tenter ma chance auprès des revendeuses du marché de Bè. Qui sait, peut-être seront-elles plus réceptives à mes demandes de militant quémandeur de subsides !

Au fait, je réponds à la question : pourquoi ne suis-je plus candidat aux législatives ? Je sais que les rumeurs les plus folles ont couru un peu partout sur cette histoire qui n’a pas d’importance à mes yeux. Sincèrement, comme dirait l’autre, « y’a pas de problème », même pas de lézard, encore moins de gecko ! Non, vraiment, c’est l’homme qui a peur, sinon y’a rien ! Je reste militant de base, et cadre du parti. Il y aura d’autres rendez-vous.

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