Tirailleurs « sénégalais » exposés à Bordeaux

Lundi 14 juin 2010. J’assiste au vernissage de l’exposition « Les Combattants d’Afrique » au Centre Jean Moulin à Bordeaux. Dehors, devant la cathédrale, quelques agitateurs de l’Association Survie tentent de perturber la cérémonie du Régiment d’Epinal qui joue la musique des tirailleurs, en distribuant des tracts hostiles au rôle de l’armée française en Afrique. Cela n’a pas l’air de trop plaire à mon ami Pierre de Gaétan, conseiller d’Alain Juppé à la mairie de Bordeaux.

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Lundi 14 juin 2010. J’assiste au vernissage de l’exposition « Les Combattants d’Afrique » au Centre Jean Moulin à Bordeaux. Dehors, devant la cathédrale, quelques agitateurs de l’Association Survie tentent de perturber la cérémonie du Régiment d’Epinal qui joue la musique des tirailleurs, en distribuant des tracts hostiles au rôle de l’armée française en Afrique. Cela n’a pas l’air de trop plaire à mon ami Pierre de Gaétan, conseiller d’Alain Juppé à la mairie de Bordeaux. « Elle a bon dos la démocratie », fulmine-t-il, avant d’attraper par le bras un des agitateurs, avec lequel il s’explique les yeux dans les yeux. « Je n’ai rien contre vous, mais c’est indécent de perturber une cérémonie en hommage à nos frères ». Pierre de Gaétan, d’origine camerounaise, voit presque rouge, normal, il est l’un de ces nombreux cadres africains de Bordeaux qui luttent pour que la ville ne perde pas sa mémoire de l’Afrique. Finalement, la police cantonnera les militants de Survie dans un coin, où ils déroulent des banderoles sur lesquels je lis pêle-mêle des revendications qui n’ont rien à voir avec le tract distribué. Survie « lassé de tirer ailleurs »? (Rires).
Jacques Toubon ne viendra pas. Je croise dans la foule de vieux amis bordelais: Alain Ricard et sa femme, Virgina Coulon, l’élégant général Bruno Clément-Bollée, commandant d’armes de la place de Bordeaux, un officier tout ce qu’il y a de plus politique et d’intello, et qui se trouve être un des lecteurs assidus de l’écrivain que je suis. Plus tard, j’entre dans le centre, et j’en profite pour revoir encore une partie de l’expo permanente consacrée à Jean Moulin, le jeune préfet résistant. Toujours la même émotion, chaque fois que je lis la vie de Jean Moulin. A l’étage, les tirailleurs « sénégalais » sont à l’honneur. Le passé croise le présent, car dans la salle, aux côtés d’Alain Juppé, on a fait venir pour l’occasion quelques vieux Marocains, dont je ne sais s’ils étaient soldats il y a de cela 70 ans ou descendants de tirailleurs. Quelques panneaux me font sourire, on y découvre les photos de quelques illustres « sénégalais »: Seyni Kountché, Mathieu Kérékou, Kolingba… Dire que le présent de l’Afrique s’est jouée aussi à l’école des guerres européennes et coloniales! Il y a beaucoup à apprendre du sacrifice des Africains dans la défense de la patrie française, et l’on se surprend à maudire intérieurement ceux qui sont opposés à l’idée d’une égalité entre la pension versée aux anciens d’Europe et aux survivants africains de cette boucherie que fut la seconde guerre mondiale. Interpellés à ce sujet, Alain Juppé qui ne siège plus à l’Assemblée jure être sensible à la question. Il le faut, car je suis sorti de l’expo avec cette impression que sans cela la seule chose que les générations futures garderont des tirailleurs africains serait l’idée insultante qu’ils n’ont été que des mercenaires. Or ces hommes-là croyaient à la fraternité d’armes, à la liberté des hommes et des peuples. Ils ont connu l’Apocalypse pour cela. Respect! Comme l’écrivait Gaston Monnerville: « Sans l’empire, la France ne serait qu’un pays libéré. Grâce à l’empire, la France est un pays vainqueur. » (15 mai 1954). Donc, il urge de solder le dossier des pensions des anciens d’Afrique.

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