
Mes souvenirs, à propos de James Brown sont assez précis et décevants pour un amateur de musique : son nom reste associé aux surprises-parties que mon grand frère organisait à la fin de lannée scolaire avec la bénédiction généreuse de mon pater. Jadmirais les performances de ses ami(es), elles libérées dans leurs jupes cintrées, eux plastronnant dans leurs pantalons « bas déléphant », certains avec des tignasses sauvages à faire pâlir de jalousie une Angela Davis. Mes frères, mes sours, et leurs ami(e)s étaient tous blacks, il ny avait aucun blanc en vue pour leur créer des complexes identitaires. Oui, en effet, à part les impérialistes blancs dont on parlait parfois à la radio, parce qu’ils en voulaient à nos phosphates et à la vie du Président, les seuls blancs dans le quartier étaient le Dr Forcados, un médecin allemand qui avait dautres chats à fouetter que de voler du minerai, le président des associations de la paroisse catholique, un métis que lon disait incestueux (allez savoir!), et puis la seconde épouse de mon pater, métisse elle aussi. Vraiment pas de quoi déclencher un mouvement des Droits Civiques ! Je nai donc pas souvenir davoir entendu les guincheurs revendiquer être « black and proud », ils auraient été ridicules. La musique leur suffisait, le discours naura du sens, pour certains, que plus tard, une fois jeté dans le grand monde. Je les regardais danser et jen profitais pour vider leurs verres, ce qui mobligeait à finir la soirée ivre comme un calice de messe.
Comme le boxeur noir américain Muhammad Ali, James Brown sest produit au Zaïre, et jamais au Togo. Je lui pardonne cette infidélité, puisque nous étions aussi partisan de la politique de lauthenticité, succédané bizarre de la négritude et de la Negro renaissance, nest-ce pas ? Bon voyage, Mister Brown, things gonna be alright !