Miss Adidogomé ou les leçons de la concurrence

0044_miss_v150Halte estivale. Reposer le corps, facile dans une certaine mesure. L’esprit ? Difficile dans mon cas. Ayant couru toute l’année, tout entier porté par les nécessités de l’action politique au service de la Francophonie et de la culture, il m’arrive de m’interroger. Voir, s’adapter, chercher le résultat, le terrain togolais est difficile pour l’application d’une telle démarche, mais chaque fois que les bras veulent me tomber, quelque chose en moi me dit qu’il faut semer, semer (dans cette relative obscurité dont parle Frantz fanon dans Peau noires masques blancs), avant de passer et laisser le flambeau à une autre génération.

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0044_miss_v150Pour l’heure, voir oblige à penser. Exemple. J’ai assisté le week-end dernier à Lomé, dans le quartier Adidogomé, à l’élection d’une Miss dénommée justement « Miss Adidogomé ». J’y avais été invité par le sponsor principal de l’événement, mon ami Michel Hoffer, ancien prof de philo reconverti dans les affaires, patron de la Société Helimex et directeur du centre culturel privé Hakuna Matata, sis dans le même quartier. Je vais d’abord confesser que je ne suis pas particulièrement fan des soirées Miss, l’intérêt culturel de ces manifestations m’ayant toujours paru usurpé. Mais il se trouve que j’ai accepté, parce que Miss Adidogomé avait lieu le même soir que la sélection régionale de Miss Togo, un événement autrement plus grandiose, et capable de drainer toutes les hautes personnalités du Togo, plutôt intéressées par l’éclat que par les vertus de la débrouille. D’ailleurs, personne ne m’avait invité à Miss Togo, je pouvais donc m’estimer heureux et me contenter des petites « Go » de quartier, plutôt mignonnes et touchantes, surtout quand elles révèlent leur inculture durant la phase des questions de culture générale (oh my Goodness) !
J’aimais bien l’idée que Miss Adidogomé et Miss Togo (sélection région maritime) aient lieu le même soir. Pour la simple raison que cela allait, je pense, dans le sens d’une concurrence légitime quartier vs institution nationale. Sans préjuger d’une victoire de l’un ou de l’autre. Au contraire, chaque événement ne peut que mobiliser son public cible. Pour les organisateurs de Miss Adidogomé, c’était l’occasion d’offrir à la jeunesse du quartier une soirée où se défouler. Adidogomé est un quartier excentré, et le quitter le soir pour aller suivre un concert, un film, un spectacle à Lomé coute cher. La municipalité d’Adidogomé n’a pas de lieu de loisirs à offrir à sa jeunesse, et les vacances deviennent vite mortelles pour elle. Toute la vérité de la difficulté de penser le secteur culturel est là, dans cet exemple. Du centre à la périphérie, penser les lieux où l’imagination se déploie, pour éviter l’ennui, la sclérose, la prostitution, etc… Toutes les sociétés qui ont sponsorisé Miss Adidogomé sont des sociétés implantées dans le quartier, et l’appui du chef canton d’Aflao Sagbado y a été aussi pour beaucoup dans la réussite de cette soirée terriblement longue (21h à 3h du matin) mais bourrée de belles leçons. Un lieu comme le centre culturel Hakuna Matata avait ce soir tout son sens, servir de réceptacle à la beauté des corps, rien que cela justifiait une nuit blanche. Vivement d’autres événements pareils dans d’autres quartiers de Lomé !

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