Je mautorise par la présente à mimmiscer dans la question de la position de la CDPA, depuis la formation de lactuel gouvernement. Pour la composition de léquipe telle quelle, je nai à proprement parler rien à dire sur sa qualité parce que les gouvernements ne valent que ce que valent les gouvernants. En cela, je ne suis ni enchanté ni ne déchante de qui que ce soit du fait que je nai quune connaissance lointaine de beaucoup de ceux là qui gravitent autour des sommets. La question que jaborde ici est relative à lentrée de la CDPA dans le gouvernement, en porte à faux avec la posture dune classe politique majeure, sous le couvert de lopposition officielle. Cest cette posture qui ne manquera guère détonner du moment quil nest jamais arrivé de voir le professeur Gnininvi solitaire dans sa stratégie, et quand il serait arrivé une fois quil ait soutenu à son corps défendant quun accord convenu avec la partie adverse nengage que les signataires dont il fut, cela na pas été pour déplaire à ceux pour lesquels il menait son combat contre la dictature de Gnassingbé Eyadéma.
Le professeur donc, pour ce qui est connu de son action publique, na jamais pris fait et cause pour le régime. Cest pourquoi, lorsque monsieur Sénouvo Agbota Zinsou linterpelle sur léchec des deux décennies de lutte au lieu de nassumer que celui de la défaite de son parti aux dernières élections, ou quil ne lhonore pas de lencombrante palme académique dont quelques esprits rusés sempêchèrent de le décorer la veille dun jour compromettant à nul autre pareil, ce nétait pas pour faire dans le genre des critiques passionnés où se délecte le petit peuple désorienté par les prestidigitateurs de tout poil. Il y a une grandeur quasiment dépassionnée et une intelligence danalyse inégalée dans les propos du très respectable Sénouvo dont je venais de lire le chant de cygne au moment même où je mapprêtais à vous écrire ce message. Après que je lai lu, et étant venu vous écrire ces mots avec la même motivation que celle qui emplit sa conscience, je nai pu me résoudre à quoi que ce soit dautre que de réaliser que si alors je me trompais sur mes conclusions, alors nous sommes désormais forcément deux.
Et de quoi donc massuré-je ainsi ne mêtre pas trompé ? Que la classe politique des aînés de toujours a définitivement perdu le combat. Il se peut dailleurs que bientôt il ny ait plus combat puisque lon a beau défier le régime en place, il ne saurait sagir dun même combat que celui qui nous opposait à la dictature dEyadéma. Dans lhypothèse de la guerre tendrait peut être aujourdhui vers sa fin, ceux qui continueraient à en brandir les haches ne rendent donc pas service au peuple ; et dans celle autre que nous allons vers la douce « démocrature » comme le Gabon la met en scène à la perfection et le Burkina Faso y avance à pas insidieux, il faut comprendre que le mal a changé de forme, non moins nocif du reste, et alors engager la lutte bien à propos. Dans ce dernier cas, il faut savoir sy prendre autrement et bien se tenir.
Voici ce que je proposerais au CDPA. Le professeur Gnininvi est entré au gouvernement pour des convictions qui sont propres à sa personne ou à son parti. Sil sen trouve auxquels cela résonne dun écho désagréable, cest parce quil est leader de ceci et quil la été de cela. Maintenant si on ne peut pas changer le cours du passé, on peut tout de même penser à ajuster le présent. Je propose au professeur Gnininvi de passer le témoin de la tête du parti. Ce nest pas seulement parce quil est rentré au gouvernement que je le lui propose, mais parce quil a sonné le glas des espoirs irréductibles tant il avait en plus de linclination à laction efficiente de groupe, une avance de prospective qui fait quà positions identiques, il est celui là qui donnerait, jen suis plus que certain, davantage de résultats escomptés Suivez mes regards. Si donc aujourdhui il cavale seul, ce ne saurait être parce quil na pas prévu la réaction qui sen serait suivie ou quil aurait comme le pensent certains en des termes durs à son égard vendu son âme au diable. Pourquoi dailleurs à bien y voir devrait il continuer à tenir chaste dans lattente du jeune marié pour les noces quand les déboires que son parti a enregistrés aux dernières élections lui laissent légitimement le droit de perdre sa virginité, nayant pas eu lélectorat représentatif auquel il devrait être assigné à rendre compte à la nation.
Mais le CDPA, comme tous les autres partis, ne pouvant et ne devant se réduire rien quà leur dirigeant ou leader, il devient utile pour le parti lui-même de devoir conduire le peuple et son électorat à une lecture plus transparente, afin que la question « pourquoi le professeur est au gouvernement ? » ninterpelle que monsieur Gnininvi personnellement de la part de ceux qui tiendraient à lui demander des comptes quand bien même il ne représenterait plus le parti au plus haut niveau, ou alors que la question soit nuancée et quon puisse dégager clairement les voix qui senticheraient à critiquer le cas échéant lentrée plutôt du parti au gouvernement. Quand alors ce serait le parti CDPA qui serait interpellé, létat major naurait pas dautre choix que de considérer sérieusement la question pour la vie et la survie du parti et pour les échéances futures.
Pour ma part, je vous confie que tandis que la question de lentrée du professeur au gouvernement guère ne mintéresse, comme jai essayé den donner les raisons, en revanche sa démarcation très peu ordinaire du combat des anciens camarades de lutte montre que limplosion est consommée, et, dès lors, je me suis rendu à lévidence que ce qui na pas pu être gagné ne le sera plus jamais dans le court terme, au grand dam des espoirs des habitants de notre commune cité. Et jai bien de raison de penser que le professeur a dû lavoir compris. Mais si tel est alors le cas, il a dû également avoir compris que pour lui et ses congénères, il reste à passer le bâton de pèlerins, eux qui, nen déplaise à leurs contempteurs, pour moi, nont, exception faite de limperfectibilité congénitale à lhomme, quasi pas démérité : je voudrais citer sans ambages les leaders du CAR, de lUFC, et de la CDPA. Dun mérite hélas qui risque de ne plus longtemps durer.
Dans lespoir davoir été le moins importun que possible et mexcusant dune attitude que je naurais osée si je navais jamais douté de la force de vision de monsieur Léopold Gnininvi, je vous prie cher ami, de recevoir lexpression de mes sincères encouragements.
Tchalla Kodjo