L’écrivain, l’argent, et la question de la nationalité française

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En parcourant le journal Telerama, j’apprends que l’écrivain rwandais Gilbert Gatore vient de voir sa demande de naturalisation rejetée. J’ai souri, et me suis souvenue de mon propre étonnement, il y a de cela quelques années, quand j’ai reçu une lettre de la Préfecture de Gironde me refusant poliment mon droit d’accéder à cette même nationalité; la raison était aussi financière, je ne gagnerais pas suffisamment ma vie comme écrivain pour prétendre devenir français. Même mon avocat était sidéré, quand la seconde fois, après un recours, le rejet fut confirmé. L’étonnement de Gatore, je l’ai ressenti, même si, comme à mon habitude, j’ai préféré laisser tomber cette bataille pour ne pas sombrer dans le ressentiment. Au fond, les critères d’accès à la nationalité française semblent tourner pour l’essentiel autour de la question de l’intégration. Mais quand on demande aux fonctinnaires préfectoraux quel est le signe tangible de l’intégration pour un étranger qui vit depuis plus de 15 ans en France, dont les enfants y sont nés, et la famille y travaille, la réponse semble être le niveau de revenus. Tiens, travailler plus pour s’intégrer plus?
Il y a comme du flou et du mépris dans cette mentalité. Beaucoup d’étrangers en France vivent comme artistes, et même s’ils ne roulent pas sur l’or, ils vivent raisonnablement. J’en connais même une flopée qui n’ont jamais vécu d’aides, qui triment et se contentent des cachets de leurs prestations. Jonathan Little, avant le Goncourt, avait connu la même humiliation. Mais une fois son prix obtenu, la même préfecture qui le trouvait manant et peu nanti, lui a fait la cour. Ainsi va la France, à l’heure où sa langue devient minoritaire dans le monde: incapable d’honorer les écrivains qui la servent, cette langue. Préférant naturaliser banquiers, entrepreneurs et autres politiciens fourrés dans des réseaux à la fraternité capitale!
Au fond, si Gatore avait eu le Goncourt (ou ployait à la mine comme Germinal), la question se serait-elle posée? Travailler plus, pour s’intégrer plus, est-ce aussi la devise du nouveau ministre de l’Intérieur, auquel on devrait poser cette question!? Too bad!

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