
Jeudi 22 mai 2008. Nous sommes assis à la terrasse du Boston Pub, mon lieu favori de rendez-vous à Lomé, en face du Centre Culturel Français. Quand je suis arrivé, en retard évidemment à cause des embouteillages monstres, nouveauté loméenne, Jeannette mattendait, calme et décontractée. Je ne la connaissais pas de vue, donc cest elle qui ma reconnu : « je vous ai vu à la télé, cest comme ça que je vous ai reconnu. » Je lui présente mes excuses pour le retard, « pas grave me répond-elle, je suis à la retraite je nai rien à faire. » Lancienne prof dAnglais était arrivée la veille de Kpalimé, et mavait aussitôt appelé pour me prévenir. Il est vrai que depuis mon retour à Lomé, jétais à sa recherche, pour lui proposer de participer à un projet de recueil de nouvelles des Editions Ndzé. Enfin, la voici, je commence par lui dire tout le bien que je pense de son roman Le trophée de cristal. Elle marrête : « Je sais, jai lu la critique que tu en as fait, mais tu nas pas compris le roman, ce nest pas un polar que jai écrit. » Et de mexpliquer patiemment pourquoi elle pense que je suis passé à côté de lessentiel : « Tu sais, la victoire de Cristal cest celle dune femme dominée qui saffranchit de la tutelle des hommes. Les hommes dominent les femmes, ils ont la force physique, ils nourrissent la famille donc ils peuvent opprimer. Dailleurs, dans un couple où cest la femme qui nourrit la famille, elle aussi tend à dominer. Donc, plus que lamour, les femmes devraient se battre dabord pour leur indépendance financière. Les hommes sont ce quils sont, on ne les changera pas, mais il faut viser toujours lautonomie financière de la femme dans le couple. Voilà ce que jai voulu raconter, laspect polar nest pas du tout important ».
Je suis dans les cordes, sonné, alors je sors une pirouette maligne : « Le critique peut se tromper. » Elle éclate de rire : « Je tai entendu dire une fois dans une émission que le critique est libre décrire ce quil veut, cela ma rassuré. » Ah bon, jai dit cela, pensai-je !? Cest possible, je nen suis pas à un paradoxe près. En tout cas, je sais ce quil me reste à faire, relire Jeannette Ahonsou, en étant davantage sensible aux préoccupations féministes sous-jacentes à son roman.
Mais de notre première rencontre furtive, je retiendrai cette réflexion de Jenny qui devrait plaire à un certain Sami Tchak, défricheur despaces lointains. Un moment nous parlions de Lomé, et elle me lance : « Rien de beau dans cette ville. Elle ninspire pas. Moi jaime mévader. Sortir de mon cadre, cest pour cela que jai pris Madagascar comme cadre de mon roman. Tana, cest beau. Je rêve de voyager depuis que je suis à la retraite. » Ah, Jenny, si tu savais comme ces paroles-là vont plaire à Raharimanana, de savoir enfin que quelquun confirme la beauté de Tana ! Le lendemain, au téléphone, je raconte ceci à Vincent S., un universitaire togolais de passage à Lomé, qui enseigne au Canada et qui se plaint, lui aussi, de la laideur de la ville de Lomé. Il approuve Jenny et conseille quau lieu de fuir son cadre, lécrivain togolais devrait peindre encore et encore les plaies ouvertes de TiBrava, euh de Lomé, pour espérer quelles cicatrisent un jour !
Au fait, comme ai-je su quelle sappelait Jenny, Jeannette Ahonsou ? Le mèl sur sa carte de visite couleur bleu ministre indiquait Jenny_ahonsou@ etc. Même si cest sa fille, ma-t-elle révélé, qui gère sa boîte mail, jimagine mal celle-ci portant un si joli prénom. Il ny a quune Jenny qui compte, elle est romancière, et écrit « comme personne, avec les mots de tout le monde » (Colette).
http://www.togocultures.com/ahouansoujeannet/index.html
Waoooh que c’est génial. Grand merci à jeannette Ahonsou pour le conseil. La femme doit être bien assisse avant de se lancer dans l’aventure d’un quelconque mariage pour ne pas être à la risiere de son mari. Merci beaucoup.
Merci Jenny pour ce conseil. Femme africaine tu es capable d’accomplir de grandes choses alors ne te minimise pas.